Nouvelles de Statistique Canada

le 7 février 2019 à 12:21
Pierre Lavallée

J’en profite pour souhaiter une Bonne Année 2019 aux lecteurs de Convergence. Dans cette édition, j’ai pensé partager avec vous un court article couvrant un projet pilote sur le sujet de la consommation de cannabis au Canada, consommation qui est devenue légale en octobre dernier. Ce changement législatif a des impacts dans plusieurs sphères de la société, incluant la production de statistiques ! Voici donc ce court article résumant le projet pilote, rédigé originalement par ma collègue Laurie Reedman, chef d’équipe en méthodologie à Statistique Canada. Bonne lecture !

Un projet pilote utilisant les eaux usées municipales pour mesurer la consommation de cannabis : estimations expérimentales

Au cours de la dernière année, Statistique Canada a mis à jour le système statistique national pour refléter les changements sociaux et économiques liés à la légalisation du cannabis. Étant donné que le cannabis était auparavant illégal, il était difficile d’obtenir des mesures de consommation précises; la stigmatisation associée à la consommation ou la réticence à divulguer les achats effectués auprès de fournisseurs non réglementés sont deux facteurs susceptibles de contribuer à la sous-déclaration.

Dans le but de remédier à l’enjeu de la sous-déclaration, Statistique Canada étudie la possibilité d’utiliser une nouvelle technique appelée l’épidémiologie fondée sur les eaux usées. Cette nouvelle méthode est utilisée en Europe depuis 2007 pour mesurer la consommation relative de différents types de drogues dans les grandes villes. Lorsqu’une personne consomme du cannabis, son corps transforme le cannabis en métabolites (THC-COOH) qui sont ensuite éliminés du corps vers les eaux usées. La technique d’épidémiologie fondée sur les eaux usées implique l’échantillonnage des flux d’eaux usées municipales et la réalisation d’une analyse chimique des échantillons pour mesurer les concentrations de composés dans les eaux usées, comme, dans ce cas, le THC-COOH. Les avantages de cette technique incluent un faible coût, l’élimination du fardeau de réponse pour les résidents ou les entreprises, un temps de traitement relativement rapide de l’échantillonnage à la production de rapports, la possibilité de générer des rapports pour des zones relativement petites telles qu’une seule grande ville et, plus important encore, la possibilité de déterminer plus précisément la masse totale de cannabis consommé.

Statistique Canada a mis en place un test pilote de l’épidémiologie fondée sur les eaux usées. Le projet pilote couvre des parties de cinq grands centres urbains du pays et près de 8,4 millions de personnes. Chaque site est échantillonné en continu au cours de la deuxième semaine du mois. L’échantillonnage a débuté en mars 2018 et se poursuivra jusqu’au printemps 2019. Les méthodes et les processus utilisés pour analyser les eaux usées sont conformes aux normes du SCORE (Sewage analysis CORe group – Europe), un consortium universitaire mondial spécialisé dans l’épidémiologie fondée sur les eaux usées.

La consommation d’une drogue est calculée comme étant le produit de la concentration en métabolites d’une drogue, du débit dans la station d’épuration, du taux d’excrétion et la puissance de la drogue, divisé par la population desservie par la station d’épuration. Un facteur d’échelle peut également être appliqué pour obtenir des estimations quotidiennes, hebdomadaires ou annuelles. Dans le cas du cannabis, il existe de nombreux produits différents, avec différents niveaux de puissance et différents modes de consommation. Le taux d’élimination du métabolite de l’organisme dépend de tous ces facteurs. Pour cette raison, un taux d’excrétion composite devrait être calculé pour tenir compte de la popularité relative des différents produits. Cependant, à ce jour, nous ne disposons pas de tous les paramètres nécessaires pour calculer un taux d’excrétion composite. Par conséquent, une approximation citée dans la littérature sur le sujet est utilisée.

Les estimations des premiers mois de collecte des données concordent avec ce que les chercheurs ont obtenu à partir d’enquêtes de Statistique Canada, à savoir que la consommation totale annuelle de cannabis au Canada se situe entre 500 et 1 500 tonnes métriques, et que des consommateurs réguliers de cannabis en consomment en moyenne un peu moins de 1 gramme par jour. L’incertitude représentée par ce grand intervalle est le reflet de notre manque de confiance dans la vraie distribution des taux d’excrétion et de la puissance des produits à base de cannabis, puis de la variabilité des données mensuelles.

Plus de détails et de résultats à propos de ce projet pilote peuvent être obtenus en consultant le site de Statistique Canada au lien suivant : https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/181129/dq181129d-fra.htm

François Brisebois

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