Il était une fois une petite statisticienne qui errait dans les dédales d’Internet à la recherche de renseignements intéressants. Le web foisonnait de données de toutes sortes et l’internaute espérait bien trouver une information qui lui permettrait d’améliorer ses connaissances de la population.
C’est alors qu’elle fut attirée par un titre des plus surprenants : «La moitié des Canadiens prévoient acheter leurs cadeaux en ligne!» Sachant qu’elle-même n’avait pas du tout l’intention de remplacer les séances de magasinage par des visites de sites web des magasins, elle s’étonna de ce pourcentage si élevé. Curieuse, elle poursuivit donc la lecture.
Elle apprit ainsi qu’un sondage démontrait que «46 pour cent des consommateurs iront sur Internet pour acheter leurs cadeaux des Fêtes cette année, comparativement à 41 pour cent l’année dernière». Une première question effleura l’esprit de la petite statisticienne : est-ce qu’aller sur Internet pour acheter un cadeau est la même chose qu’acheter un cadeau sur Internet? Bien que la petite statisticienne avait elle aussi l’intention, avant de se rendre en magasin, d’aller sur Internet pour comparer des prix, vérifier des disponibilités, elle n’envisageait toutefois pas d’y faire ses achats. Quelle était donc la question réellement posée aux répondants? Malheureusement, l’article ne le disait pas. Pourtant, il s’agissait là d’une information très importante. Sachant que, pour le Québec, le CEFRIO (centre facilitant la recherche et l’innovation dans les organisations) estime à près de 80 % la proportion de gens qui utilisent régulièrement Internet et à moins de 25 % celle des cyberacheteurs, on pourrait facilement croire que les données ne parlaient pas ici d’achats sur Internet, mais bien d’utilisation d’Internet dans le cadre du magasinage des Fêtes. Mais on ne peut en être certain.
La petite statisticienne lu la suite de l’article. Elle trouva alors dans le dernier paragraphe, celui que si peu de gens prennent la peine de lire, une autre explication possible à ce résultat si étonnant : «Le sondage a été effectué en ligne du 17 au 20 octobre 2011, auprès d’un échantillon de 1508 Canadiens choisis parmi l’échantillon Internet de la firme Léger Marketing, LégerWeb». L’inscription dans un panel Internet se faisant sur base personnelle, la petite statisticienne comprit bien que les répondants ne pouvaient absolument pas être déclarés représentatifs des Canadiens à prime abord. Certaines corrections pourraient bien entendu être appliquées, mais l’article n’en fait pas mention. Elle put donc conclure que près de la moitié des internautes suffisamment aguerris pour vouloir s’inscrire dans un panel de répondants à des sondages web pensaient faire leurs achats en ligne à Noël, quoique, sans connaître la question exacte, il restera toujours un doute…
La morale de cette histoire : ne jamais prêter foi à un titre sans prendre la peine de lire l’article jusqu’au tout dernier paragraphe.
Nathalie Madore